Déclarer moins, c’est parfois mieux. La législation européenne met la barre : impossible d’exiger plus de renseignements personnels que le strict nécessaire pour fournir un service. Pourtant, les formulaires interminables et les demandes intrusives persistent. Beaucoup d’entreprises, par habitude ou par facilité, réclament encore des données inutiles, sans jamais en expliquer le pourquoi.
Impossible, par exemple, d’imposer systématiquement le numéro de sécurité sociale. Seules quelques situations précises, encadrées par la loi, l’autorisent. Même l’adresse e-mail n’a de légitimité que si la finalité du service l’exige vraiment. Tout dépend du contexte, du service proposé, de la sensibilité des données. Ce qui est justifié pour un suivi médical ne l’est pas pour une commande de livre.
Pourquoi la collecte d’informations personnelles est devenue un enjeu majeur
Pas moyen, aujourd’hui, d’ignorer la protection des données personnelles. Toute information permettant d’identifier, directement ou indirectement, une personne physique est soumise à des règles strictes. La CNIL élargit encore ce terrain : dématérialisation, dossiers électroniques, automatisation… Adresse IP, numéro de téléphone, historique d’achats ou localisation : la variété des données recensées explose.
Depuis 2018, le RGPD impose un encadrement strict à la collecte des données personnelles aussi bien en France que sur tout le territoire européen. Son objectif : redonner la main aux individus sur ce qui circule à leur propos, à l’heure où chaque donnée a un coût. L’inscription en ligne, les cartes de fidélité ou le traçage de navigation alimentent une mécanique qui démarre au premier recueil et se termine à l’effacement.
Au sommet de la hiérarchie, il existe des données dites sensibles : santé, opinions, origine, etc. Leur usage est ultra-réglementé, car les risques sont plus grands. Les mineurs, eux aussi, sont davantage couverts, notamment quand la notion de consentement est en jeu. Qu’il s’agisse d’un commerce, d’un éditeur web, d’un professionnel de santé : tous doivent appliquer ces exigences sous la surveillance de la CNIL.
Pour rendre tout cela tangible, trois cas pratiques permettent de cerner les enjeux :
- Protection vie privée : condition minimale pour garantir la confiance dans l’économie numérique et protéger la liberté individuelle.
- Programme de fidélité : cas d’école d’une collecte limitée à la relation client et verrouillée par des règles claires.
- Conformité RGPD : base solide pour éviter tout dérapage, aussi bien légal que réputationnel.
Quels renseignements peut-on vraiment demander ?
Le RGPD tranche sans ambiguïté : chaque donnée à caractère personnel collectée doit avoir un but précis, utile et justifié. Le prénom, le nom, une adresse e-mail ou postale ? Indispensable pour gérer un compte ou acheminer une commande. La date de naissance ? Pertinente seulement si la vérification de l’âge est requise. Tout renseignement inutile doit disparaître.
Deux familles se distinguent : les données obligatoires, faute desquelles le service serait bloqué, et les données facultatives, souvent destinées à personnaliser ou à affiner une offre marketing. Jamais on ne doit rendre ces secondes obligatoires. Il convient de l’annoncer dès le départ et d’offrir un vrai choix, sans conditionner l’accès au service principal.
Quant aux données sensibles (santé, convictions, opinions…), elles imposent des critères rigoureux et réclament le plus souvent un consentement éclairé et spécifique. Préciser la durée de conservation n’est pas accessoire : garder des données plus longtemps que nécessaire expose à bien des risques juridiques.
Avant toute collecte, il faut régler clairement les points suivants :
- Base légale du recueil : contrat, consentement, obligation réglementaire ou intérêt légitime ?
- Raison précise de la demande : pour quoi ces données sont-elles nécessaires ?
- Destinataires : qui pourra accéder à ces informations ?
- Durée prévue de conservation : combien de temps resteront-elles stockées ?
Même s’il s’agit d’une donnée issue d’une source publique, la règle reste la même. Le fait qu’une information soit disponible ne signifie pas qu’elle soit librement exploitable ; un encadrement solide et une communication transparente sont indispensables.
Obligations et bonnes pratiques : ce que le RGPD impose aux collecteurs de données
Le responsable de traitement supporte seul la conformité aux règles, du recueil jusqu’à l’effacement. Ce n’est pas transférable, même si un délégué à la protection des données (DPO) accompagne les démarches. Il faut tenir un registre des traitements et être capable à tout moment de démontrer la conformité au RGPD.
La sécurité des données occupe une place de choix. Cela implique des solutions techniques (chiffrement, limitation des accès, sauvegardes régulières) et organisationnelles (sensibilisation, contrôle des droits). Une violation de données ? Un signalement à la CNIL s’impose sous 72 heures. Même les sous-traitants doivent prouver qu’ils agissent en protecteurs loyaux de l’information qui leur est confiée.
Dès qu’un transfert hors de l’Union européenne est envisagé, la vigilance maximale s’impose avec des exigences poussées. La CNIL peut demander des comptes à tout instant.
Le “privacy by design” et le “privacy by default” doivent guider chaque choix : intégrer la sécurité et la confidentialité dans la conception, limiter la collecte au strict nécessaire, former le personnel et revoir les processus internes. Aucune improvisation n’est permise.
Transparence et confiance : comment informer clairement les utilisateurs
La transparence n’est plus un luxe, c’est une exigence. Aujourd’hui, chacun réclame de comprendre ce qu’on retient sur lui, pourquoi, et par qui. Les règles imposent une information accessible, concise et compréhensible dès que la moindre donnée est collectée.
Voici ce qu’il faut toujours communiquer, sans détour, lors d’une demande d’information :
- Identité et coordonnées du responsable du traitement
- Objectifs poursuivis (finalités)
- Base juridique retenue
- Destinataires potentiels
- Limite annoncée de conservation
- Existence d’un transfert de données hors UE, si besoin
- Droits des personnes : accès, rectification, suppression, opposition, portabilité
Une charte de confidentialité ne doit pas être un pavé juridique, mais un texte limpide et consultable à tout moment. Les droits doivent pouvoir s’exercer facilement, que ce soit par courrier, e-mail, ou formulaire selon les moyens proposés. En cas d’impossibilité d’exercer un droit, la personne doit pouvoir se tourner vers l’autorité compétente.
Si des décisions sont prises automatiquement (profilage, traitements automatisés), l’utilisateur a le droit de le savoir : il faut expliquer la logique, la portée et les implications. Rien ne doit être présenté de manière ambiguë : la confiance se construit sur la clarté.
Dans chaque interaction numérique, chaque donnée comptabilisée, chaque choix paramétré, la relation de confiance se joue là. Refuser la transparence revient à installer des soupçons. Garantir la clarté, c’est ouvrir la porte à un espace numérique qui n’aura rien à cacher.


