L’exclusion d’assurance pour faute intentionnelle ne s’applique que si l’assuré a recherché le dommage tel qu’il s’est produit. Cette exigence, fixée par la jurisprudence, limite strictement les cas où la garantie peut être refusée. Une déclaration imprécise, des indices indirects ou la simple gravité des conséquences ne suffisent pas.
La preuve de l’intention ne repose jamais sur la seule apparence des faits. Les tribunaux distinguent systématiquement l’acte volontaire de la volonté du résultat dommageable. Les décisions récentes montrent que la qualification de faute intentionnelle reste réservée à des circonstances où l’intention malveillante est établie de façon certaine.
Faute intentionnelle : comprendre la notion et ses enjeux juridiques
La faute intentionnelle occupe une position à part dans le droit des assurances et de la responsabilité. Elle désigne un comportement où la personne agit délibérément pour causer un préjudice. Le code des assurances prévoit une exclusion légale : l’assureur peut refuser d’intervenir dès lors que la faute intentionnelle est établie. Tout repose sur la distinction entre l’élément matériel (l’acte lui-même) et l’élément moral (l’intention derrière cet acte), qui détermine la suite juridique du dossier.
La cour de cassation ne transige pas : il faut que ces deux aspects soient réunis pour que l’assureur puisse écarter la garantie prévue par le contrat d’assurance. La volonté de nuire, qui va bien au-delà de la négligence ou de l’imprudence, forme le cœur de la faute intentionnelle dolosive. Selon la formule que retient la deuxième chambre civile, il ne suffit pas d’avoir voulu l’acte : il faut avoir voulu le préjudice lui-même.
Mais le champ ne se limite pas à l’assurance : distinguer responsabilité civile et responsabilité pénale reste déterminant. Une faute intentionnelle entraîne presque toujours la première, et peut déboucher sur une condamnation pénale si les faits sont graves. Le texte du code, notamment l’alinéa spécifique, pousse à examiner chaque détail, chaque indice, loin du simple constat du dommage.
Pour établir l’intention, les juges s’appuient souvent sur un ensemble d’indices. Ils scrutent la cohérence entre les actes, les motivations, le contexte de l’auteur. C’est un travail d’enquête méticuleux, qui ne laisse aucune place aux automatismes et qui trace la limite entre l’imprudence et l’acte réfléchi.
Quels éléments permettent de distinguer la faute intentionnelle des autres fautes ?
Pour ne pas confondre faute intentionnelle et autres types de manquements, faute lourde, inexcusable ou simple négligence, il faut examiner deux points : la volonté d’adopter un comportement interdit et la conscience du risque ou du caractère inévitable du dommage. À la différence de la faute d’imprudence ou de la faute non intentionnelle, tout repose ici sur l’état d’esprit : la personne agit en toute connaissance de cause, cherchant à provoquer un résultat précis.
Voici comment se distinguent les principales catégories de faute :
- Faute dolosive : la volonté d’atteindre le préjudice est manifeste, on dépasse la simple faute caractérisée.
- Faute lourde : extrême négligence, mais sans volonté de nuire.
- Faute inexcusable : conscience du danger, mais pas forcément d’intention de causer le dommage.
- Faute d’imprudence ou de négligence : manque de vigilance, sans volonté délibérée.
La jurisprudence affine chaque distinction. Pour admettre la faute intentionnelle, la cour de cassation exige que la volonté de l’auteur vise le préjudice, non seulement l’acte. La faute intentionnelle dolosive suppose ainsi un acte réfléchi et une acceptation, voire une recherche, du dommage. Le code pénal et le code des assurances posent ce cadre qui guide le juge. Il s’agit d’une appréciation au cas par cas, loin de toute généralisation hâtive.
Les conséquences concrètes : assurance, responsabilité civile et droit pénal
Les répercussions d’une faute intentionnelle sont lourdes, tant pour celui qui l’a commise que pour la victime. Le contrat d’assurance ne joue plus : la clause d’exclusion s’applique dès que la preuve est rapportée. L’article L113-1 du code des assurances impose l’exclusion légale de garantie si un dommage est provoqué sciemment. Dès lors, l’aléa disparaît, la logique même de l’assurance (partage du risque) est écartée. L’auteur se retrouve seul face à ses actes.
En matière de responsabilité civile, la victime ne peut plus compter sur l’assureur : l’indemnisation devra être supportée par l’auteur lui-même, sauf si celui-ci est insolvable. Les juridictions n’accordent ici aucune marge : le responsable privé de couverture supporte l’intégralité du préjudice, même si les montants sont très élevés.
Sur le plan pénal, la faute intentionnelle fonde la plupart des crimes et délits. Le code pénal distingue clairement l’intention de nuire, condition de la responsabilité pénale. Concrètement, qu’il s’agisse de mise en danger, d’agression ou de destruction volontaire, cela entraîne des poursuites et des peines significatives. La responsabilité pénale de l’auteur reste pleine et entière, sans possibilité de faire porter la charge à autrui.
Voici ce que cela implique, point par point :
- Refus de garantie par l’assureur
- Obligation pour l’auteur d’indemniser la totalité du préjudice
- Sanctions pénales potentielles : amendes, incarcération, mention au casier judiciaire
La frontière est claire : prouver l’intention, c’est ouvrir la voie à une exclusion puissante sur tous les terrains, qu’il s’agisse de l’assurance, du civil ou du pénal. Les professionnels du droit le savent : la moindre incertitude dans la qualification d’un geste peut bouleverser l’issue d’un procès.
Exemples et jurisprudence : comment la preuve de l’intention est appréciée par les tribunaux
Devant les juges, la preuve de la faute intentionnelle ne se limite presque jamais aux déclarations de l’auteur. Les magistrats s’attachent à l’ensemble des circonstances, parfois aux silences, pour établir la volonté de causer le dommage. La cour de cassation insiste : l’intention se révèle dans le comportement et dans l’acceptation consciente des conséquences. Les décisions rendues montrent une exigence constante : il s’agit de démontrer une volonté de porter atteinte, et non une simple maladresse ou imprudence.
Un arrêt de la deuxième chambre civile du 22 octobre 2015 (n°14-23.879) en donne un exemple frappant. Une assurée avait incendié son propre véhicule dans l’espoir de percevoir une indemnisation. Les juges y ont vu une faute intentionnelle dolosive et ont exclu toute intervention de l’assureur. La troisième chambre civile a, dans plusieurs dossiers, précisé la différence avec la faute caractérisée : il faut une volonté nette, parfois appuyée par des éléments matériels, tels que des messages, des préparatifs, voire des aveux.
Dans les litiges concernant la responsabilité du notaire, la cour de cassation exige que soit démontré un acte accompli en toute conscience d’un préjudice certain pour le client. La faute intentionnelle ne se confond jamais avec une simple erreur technique. Les magistrats examinent le dossier pièce par pièce, confrontent les témoignages, pour mettre en évidence l’élément moral qui fait toute la différence. La preuve, rarement directe, se construit à partir d’un ensemble d’indices et exige un regard précis, loin des jugements automatiques.
À chaque étape, prouver l’intention, c’est lever le voile sur ce qui distingue véritablement un acte réfléchi d’un simple accident. C’est aussi ce qui continue d’alimenter les débats judiciaires, et de rappeler que, parfois, une seule conviction peut tout faire basculer.


