Marché complémentaire: c’est quoi et comment ça fonctionne ?

Marché complémentaire: c’est quoi et comment ça fonctionne ?

Un contrat public initialement conclu ne suffit pas toujours à couvrir l’ensemble des besoins qui apparaissent en cours d’exécution. Certaines prestations, impossibles à prévoir lors de la passation du marché principal, nécessitent alors la mise en place d’un dispositif spécifique, encadré par la réglementation.

La réglementation impose des conditions strictes pour autoriser le recours à ce mécanisme. Déroger à la procédure initiale n’est envisageable que dans des cas précis, définis par le code de la commande publique. Les critères d’application et les limites financières s’appliquent systématiquement afin d’éviter tout contournement des règles de la concurrence.

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Marché complémentaire : définition et enjeux dans la commande publique

Dans l’univers de la commande publique, le marché complémentaire se distingue nettement du classique avenant. Il n’est pas là pour ajuster à la marge ou corriger un oubli : il sert à répondre à des prestations supplémentaires ou complémentaires qui surgissent en cours de route, impossibles à anticiper lors de la signature du marché initial. Grâce à ce dispositif, un projet public ne se retrouve pas à l’arrêt dès qu’un besoin imprévu se présente, tout en respectant scrupuleusement les principes fondamentaux du Code de la commande publique.

En pratique, le pouvoir adjudicateur, qu’il s’agisse d’une collectivité territoriale, d’un établissement public ou de l’État, confie ces prestations au même titulaire du marché initial. L’attribution du marché suit des règles claires : la commission d’appel d’offres (CAO) doit se prononcer au-delà d’un certain montant, tandis que pour des sommes plus faibles, l’autorité administrative compétente prend la décision.

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Le marché complémentaire n’autorise aucune dérive : égalité de traitement, transparence, proportionnalité guident chaque étape, pour garantir la liberté d’accès à la commande publique et bannir toute forme de favoritisme.

Sa fonction : permettre des travaux, services ou fournitures supplémentaires, strictement indispensables à la poursuite ou à l’achèvement du contrat. La réglementation fixe un cadre précis pour éviter qu’on ne contourne la mise en concurrence. Lorsque les prestations similaires sont envisagées dès le départ dans les documents de consultation, elles peuvent être confiées au même titulaire, sans nouvelle publicité ni compétition, à condition d’être réalisées dans un délai de trois ans après la notification du marché initial.

Impossible d’improviser ici. L’acheteur public doit assurer une publicité adaptée, garantir l’accès aux documents du marché et surveiller avec rigueur le respect des plafonds légaux. C’est sur cette exigence que repose l’équilibre de la commande publique : efficacité, mais jamais au détriment de la concurrence.

Quels critères permettent de qualifier un marché de « complémentaire » ?

Pour reconnaître un marché complémentaire, l’acheteur public doit se livrer à une analyse précise, guidée par la loi. Le cadre est balisé : hors de ces critères, impossible de qualifier un marché de complémentaire.

Le premier point : seules sont concernées les prestations supplémentaires ou similaires qui s’imposent pour que l’opération aboutisse. On ne parle pas ici d’opportunités saisies à la volée, mais d’un besoin véritable, apparu après la signature, impossible à prévoir lors de la première mise en concurrence.

Le deuxième critère porte sur la nature même des prestations : travaux, fournitures ou services. Pour les travaux ou services, la limite financière est claire : jamais plus de 50 % du montant du marché initial, avenants compris. Côté fournitures, le plafond s’établit à 134 000 euros HT pour l’État, 207 000 euros HT pour les collectivités, sauf si une procédure formalisée s’impose.

Troisième critère, le temps : la réalisation de prestations similaires doit intervenir dans les trois ans suivant la notification du marché initial. Encore faut-il que cette possibilité ait été clairement prévue dans les documents de consultation (CCAP, CCTP, DPGF, BPU). Sinon, le recours au marché complémentaire est tout simplement exclu.

Enfin, la justification du recours n’est pas une formalité : il revient au pouvoir adjudicateur de prouver qu’un changement de titulaire serait techniquement ou économiquement risqué, ou que cela entraînerait des difficultés disproportionnées. C’est ce seul motif qui permet d’éviter une remise en concurrence systématique.

Les conditions légales et réglementaires à respecter absolument

Le marché complémentaire ne laisse aucune place à l’improvisation : le Code de la commande publique impose des règles précises. Sa signature ne peut intervenir qu’une fois le marché initial lancé, jamais avant. Au-delà de 15 000 euros HT, l’écrit devient obligatoire. Chaque décision, chaque modification, chaque demande de prestation complémentaire doit être formalisée, datée et archivée. Cette traçabilité garantit la transparence de l’opération.

Quand le seuil communautaire est franchi, la publicité s’effectue via une publication au JOUE. Si le marché dépasse 207 000 euros HT, la transmission au préfet de département devient incontournable. À chaque étape, la transparence guide l’action : égalité de traitement, publication des avis, critères de sélection limpides. Pour les marchés d’un certain montant, la commission d’appel d’offres (CAO) valide l’attribution.

L’acheteur public peut solliciter une demande de complément, de régularisation ou de précision auprès des soumissionnaires, mais il ne peut le faire qu’en respectant une stricte égalité : tous les candidats reçoivent la même demande, dans le même délai, sans altérer la nature des offres. Le principe de proportionnalité prime. Un candidat qui ne répond pas à cette demande peut être écarté, mais uniquement dans le respect des articles L. 2152-2 et L. 2152-3 du Code.

La Direction des affaires juridiques (DAJ) rappelle l’importance de la sincérité des échanges et de l’intangibilité des offres. Groupements et sous-traitants doivent se plier à ces règles, sans exception possible sous prétexte de complexité structurelle.

échange marché

Exemples concrets pour mieux comprendre le fonctionnement des marchés complémentaires

Pour saisir le mécanisme du marché complémentaire, rien ne vaut l’analyse de situations réelles, là où la théorie s’incarne sur le terrain.

Prenons un chantier d’école, géré par une collectivité locale. En pleine exécution, des roches inattendues compliquent les travaux : impossible de les prévoir à l’avance. Le maître d’ouvrage fait appel au titulaire du marché, via un marché complémentaire, pour gérer ces difficultés, à condition de ne pas dépasser le plafond légal et d’éviter toute nouvelle mise en concurrence.

Autre exemple : une commune commande des bancs publics. Une fois ceux-ci installés, le besoin d’ajouter des corbeilles assorties se fait sentir. Si la demande respecte les plafonds et la règle des trois ans (pour les fournitures), la commune peut procéder par marché complémentaire et s’épargner une nouvelle procédure.

Il arrive aussi que des prestations similaires justifient ce recours. Un marché de services informatiques prévoit un lot de maintenance. Trois ans plus tard, la collectivité souhaite étendre les services au même prestataire, à condition que cette possibilité ait été prévue dans le CCAP ou le CCTP initial. Dans ce cas, un avenant pourra acter la modification, à la stricte condition de ne pas bouleverser l’économie générale du contrat de départ.

Pour préciser ce qui relève d’un marché complémentaire, voici les principales situations à retenir :

  • Les marchés complémentaires sont utilisés pour des travaux, fournitures ou services strictement nécessaires à la bonne exécution de l’opération initiale.
  • Le recours reste strictement encadré : durée, montant total (jusqu’à 50 % du marché initial pour les travaux et services), justification technique rigoureuse.

Reste une ligne de conduite : seules les prestations imprévisibles ou techniquement indispensables à la cohérence du service public ou de l’ouvrage permettent de recourir à ce dispositif, sans jamais perdre de vue l’exigence de loyauté et de concurrence. S’y tenir, c’est refuser les détours faciles et garantir à la commande publique son efficacité sans jamais sacrifier sa transparence.